Resumé: |
À travers la description et lanalyse de la vie quotidienne dune ancienne collectivité villageoise provençale, ce livre sattache à décrire la mentalité et le style de vie de ses habitants en soulignant les mutations et les bouleversements que cette collectivité a subis depuis la dernière guerre jusquaux années 2000. Lurbanisation et la modernisation ne signifient pas seulement la fin dun monde clos et de son « chauvinisme de clocher » ; elles se paient dune dissolution du lien collectif, entraînant lindividualisme vers une « postmodernité » problématique. De la « communauté villageoise » et du « peuple ancien » au « nouveau monde », les différentes parties du livre sont ordonnées autour de cette mutation : le développement de la consommation, du loisir et du tourisme ont érodé les anciennes traditions provençales ; les « néo ruraux » formés de couches moyennes urbaines et de catégories fortunées se sont substitués aux anciennes couches populaires touchées par le chômage et la fin de leur « petite patrie » quétait la collectivité villageoise. La fracture est à la fois sociale et culturelle et met en jeu des conceptions et des rapports différents à la vie individuelle et collective. À rebours dune vision idéalisée de la Provence, La fin du village montre une autre réalité où les populations locales ont le sentiment dêtre « envahies » dans la période estivale la Provence étant devenue, selon une expression largement usitée dans la région, le « bronze-cul de lEurope ». Tandis quaffluent touristes et nouveaux habitants fortunés en mal de soleil et de ciel bleu, les Provençaux se vivent comme les derniers témoins dun patrimoine qui ne leur appartient plus, ou pire encore, les gardiens dun décor de théâtre ou une « espèce en voie de disparition ». Aux anciens rapports villageois a succédé un individualisme désaffilié dont le rapport à la collectivité est devenu problématique. Sans nostalgie pour un supposé « bon vieux temps », lauteur passe au crible de lanalyse critique les dérives du « nouveau monde ». Sur fond de chômage et de « village dortoir », il souligne limportance prise par les fêtes en tout genre, l« animation sociale et culturelle » et ce quil nomme dun sobriquet les « cultureux » dont l« ouverture » et les « pratiques artistiques » constituent un curieux mélange de pédanterie et de militantisme revisité ; il rend compte de formes nouvelles déducation et danimation de la jeunesse qui tentent de façonner des individualités nouvelles avec un angélisme des droits de lhomme et une écologie qui verse dans le moralisme et les bons sentiments ; il sinterroge sur la façon dont la collectivité envisage aujourdhui son rapport à la nature, à la vieillesse et la mort. Ces conceptions et ces comportements coexistent avec des formes nouvelles de misère et de désaffiliation (la « déglingue ») liées à la combinaison du chômage et à la déstructuration familiale. Le « village bariolé » qui succède à lancienne collectivité villageoise fait coexister des catégories sociales et des mondes séparés à lintérieur dun même espace géographique vide de projet commun. En ce sens, la « fin du village » constitue une sorte de « groupe témoin » dune France morcelée et dune évolution problématique des sociétés démocratiques, que les responsables politiques et les citoyens se doivent daffronter au plus près des réalités.
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